Chers parents, je vous implore d’arrêter de blâmer et de condamner les autres parents.
Il y a trente-cinq ans, une mère qui faisait ses courses dans un grand magasin a laissé son fils avec un autre groupe de garçons qui essayaient le dernier jeu Atari, afin d’aller voir les lampes. Ce garçon s’appelait Adam Walsh.
Il y a trente ans, un nourrisson de 18 mois qui jouait dans le jardin de sa tante est tombé dans un puits. Les secouristes ont travaillé sans relâche durant 58 heures pour libérer « la petite Jessica » du puits.
Dans les deux cas, une tragédie est arrivée : un terrible accident a entraîné la mort d’Adam et un nourrisson s’est accroché à la vie dans les profondeurs. Mais ils ont également autre chose en commun : un pays entier, de mères et de pères, soutenant les parents endeuillés.
Permettez-moi de le répéter : tout le monde a rapporté les efforts des secours sans reproches. Sans reproches. Aucun. Rien du tout.
Aucune question n’a été posée, aucun commentaire du type : « où se trouvaient les parents ? ». Simplement un pays d’autres parents et de grands-parents, horrifiés par le fait que des parents, comme eux, traversaient l’impensable. Adam était notre fils, Jessica notre fille.
Nous étions ces parents.
Revenons en 2016, l’année des « parents parfaits ».
Hier, un garçon de 2 ans qui barbotait dans les eaux des bords magiques du lac d’un hôtel de tourisme Disney a succombé à la nature sauvage. Un alligator agressif l’a tiré hors de l’eau, juste sous les yeux de son père qui a essayé de se battre avec l’alligator pour libérer son fils. De l’horreur à l’état pur, une terreur indicible. Les parents ont dû regarder leur bébé leur être retiré comme dans un documentaire animalier.
Un accident tragique et imprévisible. Un accident.
J’ai pleuré pour ces parents. Les peurs, souffrances, tristesses et regrets qui les habitent à chaque seconde me rendent malade. Je parie que c’est également votre cas.
Mais ce n’est pas celui de tout le monde.
Nous vivons aujourd’hui dans un monde où les accidents ne sont pas permis. Vous m’avez bien entendu : les accidents, quels que soient leurs formes, la façon dont ils arrivent et le moment où ils surviennent, ne se produisent simplement plus.
Pourquoi ? Parce qu’il faut chercher d’où vient la faute et condamner.
Car nous sommes devenus une nation d’accusateurs.
Et comment pouvons-nous accepter que des accidents puissent se produire si nous ne pouvons blâmer personne ? Ce n’est pas possible, tout simplement. Ainsi des faits naturels aléatoires, des tragédies imprévisibles et des évènements funestes qui viennent bouleverser une vie en un clin d’œil ne peuvent survenir si tout le monde est un parent responsable, non ? Eh bien non.
Cela ne peut pas arriver, car ce pays et sa population de « parents parfaits » sont assis derrière leurs claviers pour accuser. Ils ont besoin de blâmer, de dénigrer, de critiquer partout et de toutes les façons possibles les qualités parentales des autres.
Et quand peuvent-ils réellement s’en donner à cœur joie ? Lorsqu’un accident tragique survient. Alors, quand les faits sont encore frais, lorsque l’émotion brute et l’ignorance se heurtent, ils plongent leurs mots acérés tels des serres pour s’emparer du peu de miséricorde qui habite encore l’esprit des parents endeuillés.
Avant de l’arracher.
Écoutez-moi très attentivement vous les « parents parfaits ».
J’en ai assez.
J’en ai assez de parcourir des commentaires et d’y retrouver encore et toujours des questions comme : « où se trouvaient les parents ? », et des réflexions telles que : « voici ce qui arrive lorsque vous ne surveillez pas vos enfants ».
J’en ai tout simplement assez.
J’ai une question pour les parents accusateurs, vous savez, ceux qui accusent immédiatement les parents, ceux qui vont sur internet et rédigent des commentaires de ce type : « c’est le résultat de la négligence des parents » et « ils auraient dû faire preuve de plus de discernement. Qui surveillait ce petit garçon ? » et mon préféré : « je n’aurais jamais laissé cela arriver à mon enfant. »
Voici ma question :
Avez-vous déjà assisté aux funérailles d’un enfant ?
Moi je l’ai fait.
Les obsèques d’un enfant sont un évènement auquel vous ne souhaitez jamais assister.
Maintenant, laissez-moi vous poser une autre question.
Dans la semaine à venir, ces parents vont retourner chez eux dans le Nebraska sans un de leurs enfants. Ils vont quitter un lieu de villégiature, ranger son pyjama Buzz l’éclair et son doudou, et ils vont faire un trajet atrocement difficile vers leur foyer. Un trajet qu’il pensait n’avoir jamais à faire.
Ils vont rencontrer le directeur d’un salon funéraire, choisir un petit cercueil, et, entouré de leur famille, vont enterrer leur petit garçon.
Et ils souffriront tous les jours du reste de leurs vies.
Durant les obsèques de ce petit garçon de 2 ans pouvez-vous me faire une faveur ? Pouvez-vous aller à la rencontre de la mère et lui dire les mots que vous avez tapés la semaine dernière ? Pouvez-vous ? Êtes-vous capable de la saluer, la prendre dans vos bras, serrer la main du père et demander ensuite « qui surveillait ce petit garçon ? Vous auriez dû faire preuve de plus de discernement. Je n’aurais jamais laissé cela arriver à mon enfant. »
Êtes-vous capable de faire ça ? Vous ressentiez suffisamment profondément ces mots pour les mettre en ligne à la vue d’un million de personnes. Donc vous pouvez les dire directement aux personnes auxquelles vous vous adressiez, non ?
Laissez-moi vous aider.
Mettez de côté vos accusations pendant un instant et essayez ceci :
Aux parents qui ont passé des vacances avec leur petit garçon pour la dernière fois hier, je suis profondément désolé que vous ayez vécu la pire tragédie possible, un accident. Je porte le deuil avec vous. Votre bébé était mon bébé. Votre fils était mon fils. Je n’éprouve que de l’amour pour vous, de l’amour pour vous aider à traverser la douleur d’hier, celle d’aujourd’hui et ce que vous traverserez demain et les jours qui suivent. Mes pensées et mes prières vous accompagnent. Que d’une façon miraculeuse, Dieu vous apporte la paix, à vous et votre famille.
Voici ce que vous dites. Ceci, et seulement ceci.
Arrêtez de blâmer.
Arrêtez d’accuser.
Dans les heures les plus sombres, pouvons-nous simplement aimer les autres parents ? S’il vous plaît ?
Melissa Fenton